Affaire Baupin : l'enquête classée sans suite "pour prescription"

Quatorze femmes avaient témoigné contre l'ex-vice-président de l'Assemblée nationale pour des faits de harcèlement et d'agression sexuelle.

Source AFP

L'affaire Denis Baupin classée sans suite. 
L'affaire Denis Baupin classée sans suite.  © citizenside.com

Temps de lecture : 4 min

L'affaire avait fait grand bruit. Elle ne mènera finalement nulle part. Tout du moins judiciairement. Des accusations « corroborées », mais des faits « prescrits » : ce lundi, la justice a classé sans suite l'enquête sur le député écologiste Denis Baupin, au coeur d'un scandale d'agressions et de harcèlement sexuels présumés. Près d'un an après les révélations de Mediapart et France Inter, le parquet de Paris a considéré que, si certains faits étaient « susceptibles d'être qualifiés pénalement (...), ils sont cependant prescrits ». La justice s'était saisie le 10 mai 2016 d'une enquête pour « agression, harcèlement sexuels et appels téléphoniques malveillants » au lendemain des accusations lancées par huit femmes, quatre anonymes et quatre élues écologistes à visage découvert, dont Sandrine Rousseau, secrétaire nationale adjointe d'Europe Écologie-Les Verts (EELV). Denis Baupin (ex-EELV) a accueilli avec « satisfaction » cette décision, tout en disant regretter que « la prescription s'appliquant à certaines des accusations constitue une entrave au rétablissement de la vérité alors même que son nom et son honneur ont été bafoués », a déclaré son avocat, Me Emmanuel Pierrat, dans un communiqué.

Le point du soir

Tous les soirs à partir de 18h

Recevez l’information analysée et décryptée par la rédaction du Point.

Votre adresse email n'est pas valide

Veuillez renseigner votre adresse email

Merci !
Votre inscription a bien été prise en compte avec l'adresse email :

Pour découvrir toutes nos autres newsletters, rendez-vous ici : MonCompte

En vous inscrivant, vous acceptez les conditions générales d’utilisations et notre politique de confidentialité.


Jointe par l'Agence France-Presse, Sandrine Rousseau a fait part elle aussi de sa « satisfaction », mais uniquement parce que « le parquet reconnaît qu'il y a des faits pénalement qualifiés ». « J'aurais préféré que Denis Baupin soit poursuivi », a-t-elle ajouté.

Agressions sexuelles, SMS insistants, gestes déplacés, à l'époque, le récit de ces huit premières femmes avait libéré la parole : au total, quatorze s'étaient confiées dans les médias. Trois des quatre élues, Isabelle Attard, Elen Debost et Mme Rousseau, avaient déposé une plainte. Suivies par Véronique Haché, actuelle directrice d'Autolib', pour une agression sexuelle en 2004, à l'époque où elle travaillait au cabinet du maire de Paris Bertrand Delanoë (PS). Sandrine Rousseau avait elle aussi dénoncé une agression sexuelle, en octobre 2011, dans un couloir, en marge d'une réunion publique. Elen Debost évoquait « plusieurs mois de SMS d'incitation sexuelle ». Dans la plupart des cas, ces faits portaient sur une période allant de 1990 à fin 2013, couverte par la prescription qui était de trois ans pour ce type de délit et qui vient d'être doublée dans la loi du 16 février.

« Jeux de séduction »

Un seul cas semblait échapper à la prescription : celui de Mme Attard, députée du Calvados, qui affirmait avoir reçu des dizaines de SMS de Denis Baupin de juin 2012 à fin 2013. Un « harcèlement quasi quotidien de SMS provocateurs, salaces », selon elle. Denis Baupin s'était défendu d'être le « DSK des Verts » dans une interview à L'Obs le 2 juin dernier, niant « avoir jamais commis ni de harcèlement sexuel ni d'agression sexuelle ». En parlant des SMS, il faisait valoir des « jeux de séduction » entre adultes, tout en reconnaissant que « des comportements peuvent inutilement blesser ». Il avait fait diffuser dans la presse certains SMS échangés avec certaines accusatrices, censés le dédouaner, avant de les remettre aux enquêteurs. Dans ce parole contre parole, une confrontation a eu lieu en décembre entre Denis Baupin et Isabelle Attard. Cette dernière n'était plus en possession des messages litigieux, mais l'un de ses collaborateurs, Frédéric Toutain, avait remis aux enquêteurs des SMS que l'élue lui envoyait. Ils montraient qu'« elle ne savait plus comment faire comprendre à Denis Baupin qu'elle n'était pas intéressée », avait-il raconté à l'Agence France-Presse. Ces derniers mois, les policiers de la brigade de répression de la délinquance contre la personne (BRDP) de la PJ ont entendu une dizaine de victimes présumées, celles qui avaient parlé dans la presse et d'autres apparues dans l'enquête, mais aussi des dizaines de témoins, dont Cécile Duflot, selon une source proche de l'enquête. Ces accusations avaient relancé le débat sur les relations hommes-femmes dans le huis clos très masculin du milieu politique français. Elles avaient aussi posé la question de la loi du silence au sein de son parti. Le parquet a notamment expliqué « la tardiveté » des dénonciations par « le désarroi » dans lequel certaines femmes s'étaient trouvées « face au comportement d'un cadre du parti politique auquel elles appartenaient ». Après ces accusations, Denis Baupin avait démissionné de son poste de vice-président à l'Assemblée nationale, tout en conservant son siège de député. Il ne briguera pas de nouveau mandat aux législatives de juin.

LIRE aussi. Des collaboratrices parlementaires lancent un site pour dénoncer le sexisme.


Ce service est réservé aux abonnés. S’identifier
Vous ne pouvez plus réagir aux articles suite à la soumission de contributions ne répondant pas à la charte de modération du Point.

0 / 2000

Voir les conditions d'utilisation
Lire la charte de modération

Commentaires (105)

  • janou002

    . Une action judiciaire dont 3 juges (dont un du mur des cons ! ) ont été saisis à l'encontre de François Fillon a été précipitamment décidée avant qu'une loi ramenant à 12 ans la prescriptions des faits qui lui sont reprochés, soit promulguée. L'application à son cas de cette loi aurait eu pour effet de prescrire tout ce qui étaient antérieur à 2005 ! La "justice" a donc fait en sorte de le priver de cette possibilité ! Dans l'affaire baupin, une loi doit intervenir ces jours ci pour, inversement, allonger le délai de prescriptions des actes dont il a été accusé à 6 ans ! Pour un certain nombre d'entre eux, il n'aurait pas pu bénéficier de la prescription... Oui mais voilà, dans son cas, la "justice" du mur des cons s'est précipitée à faire usage de la loi actuelle ( 3 ans) pour l'exonérer de tout! Alors, juste et équitable, la "justice" du mur des cons ?
    et bien sûr, les aveugles continuent à nier l'acharnement politico-judiciaro-médiatique contre Fillon!

  • bidibulle

    Coincidence cynique.

  • Liane75

    De toute façon la prescription sera pour vous aider ! Et si vous êtes député c'est parfait.